Le centre d’hébergement collectif de Rigot à Genève (1er Prix)

Tous les trois ans le Prix Lignum récompense les meilleures prestations en bois, du meuble aux ensembles résidentiels en passant par les aménagements intérieurs. Les projets lauréats de la Région ouest illustrent parfaitement la diversité de mise en œuvre du bois : Le centre d’hébergement collectif de Rigot à Genève (1er Prix) fait l’éloge du tout bois qui a été utilisé jusqu’aux fondations. Le complexe scolaire de l’écoquartier des Vergers à Meyrin (2ème Prix) élargit le champ des possibles entre le bois et le béton. La surélévation exemplaire à Vevey (3ème Prix et Bronze national) fait quant à elle office de jalon pour tout un quartier. Cinq autres projets ont également été récompensés par une mention.

1er prix : Centre d’hébergement collectif de Rigot, Genève (Label Bois Suisse)
Le Centre d’hébergement pour réfugiés de Rigot, à Genève, se situe à proximité de la place des Nations, non loin du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés et du Palais des Nations. Le choix du site est un geste politique fort qui réaffirme la tradition genevoise de l’accueil. Au lieu d’ériger le centre près d’une sortie d’autoroute ou au fin fond d’une zone industrielle, la Ville a retenu un terrain bien centré qui cherche le contact avec le voisinage.
Le complexe se compose de deux barres de cinq niveaux pouvant accueillir 370 réfugiés. Les bâtiments sont implantés avec précision, tant du point de vue topographique qu’urbanistique. Ils rachètent la légère déclivité du terrain et délimitent une cour intérieure. Une succession de terrasses fait tampon par rapport à la route agrémentée de plates-bandes que les résidents cultivent avec les riverains. À l’autre extrémité, la cour débouche sur le parc Rigot, qui n’est séparée par aucune clôture. Le centre est une réalisation provisoire, conçue pour dix ans. Les architectes ont opté pour une construction modulaire et une stratégie ‹zéro béton›. Les deux barres sont entièrement réalisées en bois, depuis les fondations – des pieux battus en mélèze – jusqu’à la toiture. Ainsi la Ville pourra-t-elle, dans dix ans, restituer le terrain au parc et réinstaller les modules à un autre endroit. Tous les éléments pourront être réutilisés. Le projet constitue un exemple remarquable de gestion durable de l’espace urbain et du matériau bois.

La construction, composée d’éléments modulaires préfabriqués, est très économique. Le système permet d’aménager des logements pouvant accueillir entre deux et huit personnes. Les modules rythment les façades selon une ordonnance très rigoureuse, tandis que la cour centrale est animée par les coursives desservant les logements.

Le projet exploite de façon optimale les avantages de la construction bois industrielle, grâce à laquelle résulte une plus-value architecturale tout à fait remarquable pour ce type de programme. Le choix radical de recourir intégralement au bois a d’ores et déjà rencontré de l’écho par-delà la frontière nationale.

Sur le Centre d’hébergement pour réfugiés de Rigot : Inauguration du centre d’hébergement collectif pour migrants de Rigot

2ème prix : Équipements publics de l’Écoquartier les Vergers, Meyrin
Situé sur les confins de la ville et de la campagne, le complexe scolaire des Vergers, à Meyrin, se compose de quatre grands bâtiments pavillonnaires délimitant plusieurs cours ouvertes sur le site. Par rapport à l’idée que l’on se fait en général de la construction bois, on est d’abord déconcerté, en découvrant le nouvel ensemble, par l’apparente prédominance du béton mis en œuvre sous la forme de coursives périphériques et de vastes avant-toits qui relèguent les façades en bois et verre à l’arrière-plan. Les architectes ont renversé la logique habituelle en réalisant d’abord l’exosquelette et les gaines d’ascenseurs en béton, puis la structure et les aménagements intérieurs en bois. Du point de vue constructif, les deux s’imbriquent à merveille, les raccords étant très proprement résolus et parfaitement exécutés.

À l’intérieur, c’est l’épicéa clair des parois et planchers qui domine. Les planchers mixtes bois-béton, revêtus de terrazzo, assurent l’isolation phonique requise et servent de masse thermique. Les coursives, qui peuvent être utilisées comme voies d’évacuation, protègent assez efficacement les façades du soleil pour rendre des stores superflus. Les avant-toits en béton garantissent par ailleurs une excellente protection contre les intempéries, aucune autre mesure de préservation du bois n’ayant ainsi dû être prise.

Les rez-de-chaussée abritent les fonctions publiques telles que restaurant, aula et salle de sport. Au-dessus se trouvent les salles de classe, entre lesquelles sont ménagés de généreux dégagements. Les étages supérieurs sont desservis par d’étroits escaliers, ce qui donne lieu à un curieux rituel: à la fin de la récréation, les maîtres vont chercher leurs élèves dans le préau et les font regagner leur classe à la queue leu leu. Les portes se ferment les unes après les autres, et un silence concentré s’installe.

La construction scolaire est un domaine d’application privilégié pour la construction bois. L’ensemble de Meyrin élargit le champ des possibles. Il convainc tant par son implantation que par son organisation en plan et par l’ambiance des locaux. Quant à sa construction hybride, qui renverse le rapport usuel entre bois et béton, elle ouvre une voie des plus prometteuses.
(voir aussi : https://www.lignum-geneve.ch/objets-par-commune/equipements-publics-de-lecoquartier-les-vergers/)

3ème Prix et Bronze national: Surélévation à Vevey
La surélévation de cette ancienne maison d’artisans veveysanne donne l’impression d’avoir toujours existé. Mieux : elle confère au bâtiment encore plus de valeur qu’il n’en avait. À partir de l’existant, les architectes ont développé un vocabulaire qui leur a permis d’en poursuivre l’histoire. Le projet s’est par ailleurs enrichi de thèmes fournis par le contexte urbain. De fait, la surélévation n’accroît pas seulement la densité du quartier en termes de volume construit, mais aussi de culture du bâti.

Il en va de même à l’intérieur, où les architectes réinterprètent, dans la surélévation, le motif de la galerie-jardin d’hiver. Le grand espace ouvert est ici subdivisé en différentes zones par les éléments porteurs de la construction bois. L’exécution est soignée et chaque détail mûrement étudié. En s’inspirant du vieux motif de la charpente, les architectes déclinent un langage architectural singulier, dont la richesse fait plus que compenser le peu de place à disposition.

La stratégie adoptée est susceptible d’être appliquée à de nombreuses surélévations en Suisse. Elle illustre les avantages du bois pour ce type d’interventions, auxquelles le matériau se prête idéalement. Elle montre que la densification peut être un gain tant pour les propriétaires et les habitants que pour le quartier tout entier. Enfin, construction bois et construction massive se conjuguent ici comme si toutes deux avaient toujours été indissociables.

Mention – Maison de l’Ile aux Oiseaux, Préverenges (Label Bois Suisse)
À la fois musée et lieu d’animation, cette maison a été réalisée par le Cercle ornithologique de Lausanne pour faire découvrir aux visiteurs les oiseaux aquatiques de la réserve naturelle voisine. Elle reprend des motifs connus – toit à deux pans, fenêtre ronde – qui renvoient à l’archétype du nichoir pour oiseaux. Et pourtant, elle est différente. L’élégante cabane surprend par sa construction originale.

Les architectes ont adopté une approche subtile de la construction, sans volonté trop didactique. Misant sur les qualités sensorielles du bois, ils ont habilement joué des tons bruns et noirs pour en modifier la perception. La maison de l’Île aux Oiseaux témoigne de l’envie d’innover en alliant audace et légèreté.

Mention – Théâtre Le Douze dix-huit – Ferme Pommier, Le Grand-Saconnex
Au milieu des immeubles d’habitation et des rues bruyantes se trouve, au Grand-Saconnex, une véritable oasis: l’ensemble dévolu aux activités associatives et culturelles que constituent l’ancienne Ferme Pommier, le théâtre Douze dix-huit et le parc public attenant. Le volume compact du nouveau théâtre, coiffé d’un toit à deux pans faiblement inclinés, reprend la typologie de l’ancien bâtiment d’exploitation et sert de laboratoire à l’art dramatique contemporain. Couleurs, matériaux et construction contrastent ici avec les murs au crépi clair de la ferme. Le nouveau théâtre démontre que des moyens architecturaux mis en œuvre avec retenue et intelligence permettent de créer, en interaction avec le contexte, un lieu public de qualité. Rien ici n’est superflu, tout est à sa place.
(voir aussi : https://www.lignum-geneve.ch/objets-par-commune/ferme-pommier-theatre-1218/)

Mention – Nouvelle crèche, Renens (Label Bois Suisse)
À côté d’un ancien rural rénové, la Ville de Re­nens a fait construire une nouvelle crèche. Les hautes et étroites fenêtres laissent entrer une lumière abondante et es­tompent les limites entre intérieur et extérieur. L’architecture est entièrement conçue en fonc­tion des besoins des enfants. Des demis-niveaux génèrent des espaces stimulants, tout en sépa­rant les différents groupes. Le bâtiment convainc par sa cohérence, ses détails bien résolus et la fluidité de ses espaces. Mérite également d’être relevée la qualité de l’implantation urbanistique qui intègre l’ancien rural et laisse de la place aux jardins familiaux attenants.

Mention – Logements pour étudiants Vortex, Chavannes-près-Renens
À deux pas du campus de l’Université de Lausanne s’érige un projet d’une échelle inédite en Suisse: un gigantesque bâtiment en forme d’anneau, avec une cour de 105 mètres de diamètre. Dans ce colossal immeuble, qui a d’abord hébergé les athlètes des Jeux olympiques de la jeunesse de 2020, vivent aujourd’hui quelque 850 étudiants. Une rampe en béton hélicoïdale d’une pente de 1 pour cent relie tous les logements à la manière d’une coursive sans fin. Si la structure du bâtiment se compose de murs de refend et de dalles en béton, les façades des ‹ boîtes d’habitation › se composent d’éléments bois sur mesure. Les courts délais d’exécution ont conduit les concepteurs à miser sur le BIM et la préfabrication. Contrastant avec la dureté du béton, le bois confère à l’imposant ouvrage une certaine chaleur et un caractère engageant, tout en assurant la médiation entre dimension paysagère et échelle humaine.

Mention – Surélévation Ecole Rudolf Steiner de Genève, Confignon
C’est en parfaite conformité avec les idées de Rudolf Steiner que Jean-Jacques Tschumi avait réalisé, en 1987, cette école de Confignon aux formes organiques disposées autour d’une cour. De toute évidence, l’architecte avait conçu l’aile à deux niveaux des salles de classe de manière à ce qu’elle puisse être plus tard surélevée. Avec un grand respect pour ce bâtiment original, le bureau Localarchitecture est parvenu, grâce aux outils de modélisation 3D, à développer cette forme complexe en proposant une interprétation contemporaine en bois. Côté cour, le bois est mis en scène de façon maîtrisée. Les nouvelles salles sont, en toute simplicité, revêtues d’épicéa et de sapin. La surélévation inventive de ce bâtiment riche en détails lui confère de l’ampleur et montre que le bois se prête parfaitement à l’extension d’ouvrages sortant de l’ordinaire.

Informations concernant le Prix Lignum 2021
Faire connaître un travail du bois orienté vers l’avenir, tel est l’objectif du Prix Lignum, décerné à l’échelle nationale pour la cinquième fois depuis 2009. Des bâtiments, aménagements intérieurs, pièces de mobilier et œuvre d’art réalisés en Suisse ou au Liechtenstein entre le 1er janvier 2017 et le 30 mars 2021 étaient admis à concourir. Le Prix Lignum 2021 et le Prix spécial menuiserie ont été remis sur le plan national le 30 septembre à Berne. Les prix régionaux ont été remis dans les cinq régions de Suisse le 1er octobre 2021.

Au total ce sont 530 projets répartis dans cinq régions de Suisse qui ont été inscrits au concours :
– Ouest : BE-f, FR-f, GE, JU, NE, VD, VS-f – 85 projets inscrits
– Centre-Ouest : BE-d, FR-d, VS-d – 67 projets inscrits
– Nord : AG, BL, BS, SH, SO, ZH – 152 projets inscrits
– Est : AI, AR, FL, GL, GR, SG, TG – 120 projets inscrits
– Centre : LU, NW, OW, SZ, TI, UR, ZG – 106 projets inscrits

Pour chacune des cinq régions, un jury indépendant a attribué trois premiers prix et entre 4 et 7 mentions. Parmi les 15 projets représentant les trois premiers prix des cinq régions, un jury national a décerné un Prix Or, Argent et Bronze ainsi que parmi 165 projets inscrits, deux Prix spécial menuiserie.

Les six membres de chaque jury étaient extérieurs à la région considérée et issus de domaines d’activité bien distincts. Chaque projet inscrit a été analysé de manière détaillée puis, pour une sélection de réalisations, visités in situ afin de leur attribuer Prix et Mentions. Claudia Cattaneo, Commissaire d’exposition et ancienne co-directrice du musée des arts appliqués de Winterthur, de Zurich, a comme en 2018, officié comme Présidente des Jurys. Liste détaillée des membres du jury Prix Lignum 2021.